Description
Exceptionnelle miniature offerte par le peintre de fleurs Van Dael à l’Impératrice Joséphine, dans un cadre reliquaire aux armoiries de la couronne impériale. Jan Frans VAN DAEL (Anvers, 27 mai 1764 – Paris, 20 mars 1840) « Bouquet de fleurs sur une margelle en marbre » Selon la Classification des plantes de Pierre-Joseph Redouté, 1804 : 5 roses (rosa centifolia), 3 tulipes perroquet (tulipa agensis), oreilles d’ours (auriculae) et 2 branches d’ancolies dorées (aquilegia alpina) Aquarelle et gouache sur feuille d’ivoire ronde, sur son paillon d’origine Diamètre : 7,4 cm , 8,6 cm avec le cadre. Hauteur totale : 11 cm Cadre reliquaire en bronze doré, ciselé de perles, tors de ruban, urne couverte à la bélière et couronne impériale au revers, sur fond de soie verte Signé en bas à gauche : VD Provenance : Offert par l’artiste à l’impératrice Joséphine puis par héritage dans la famille de Tascher. Historique : Le succès des représentations de fleurs de Jan Frans van Dael tient à l’originalité et à la virtuosité à l’oeuvre dans ses peintures et surtout ses miniatures. Le talent qu’il ne cessa de développer dans la réalisation de gouaches valut à l’artiste d’origine flamande d’être sollicité par les amateurs les plus prestigieux, en particulier l’impératrice Joséphine, comme en témoigne notre remarquable miniature, dont le revers du cadre porte les armoiries de la couronne impériale. Van Dael, « peintre de fleurs » Né en 1764, à Anvers où il suit une formation dans l’atelier d’un peintre de décors dès l’âge de douze ans, Jan Frans Van Dael remporte en 1784 et 1785 le premier prix d’architecture de l’académie anversoise. L’année suivante, il s’installe à Paris où il s’enrôle comme peintre décorateur et participe aux travaux des châteaux de Chantilly, Saint-Cloud et Bellevue. Complétant peut-être sa formation auprès de son compatriote et peintre de nature morte Gérard van Spaendonck (1746-1822), Van Dael débute une production de peintures de fleurs qu’il expose au Salon dès 1793 et qui le rendra célèbre. Son rapide succès se manifeste par l’obtention d’un logement au Louvre et sa présence au centre de la fameuse Réunion d’artistes dans l’Atelier d’Isabey que Louis-Léopold Boilly expose au salon de 1798 (Paris, Musée du Louvre, ill. 1). Vers 1799, Joséphine Bonaparte achète L’offrande à Flore, suivie du Tombeau de Julie en 1804 (ill. 2 et 3), deux grandes toiles présentées au Salon qui orneront les murs de Malmaison. Louis XVIII et Charles X comptent également parmi la clientèle distinguée de Van Dael. Recevant un prix au Salon de 1801, puis médaillé d’or au Salon de 1810 et 1819, l’artiste est décoré de la Légion d’Honneur en 1825. Il est membre de la Société royale pour l’encouragement des beaux-arts à Anvers et de l’Académie royale des beaux-arts d’Amsterdam. Enfin, il donnait des leçons de peinture pour les femmes, dans son atelier parisien de l’impasse des Feuillantines. L’harmonie des contraires miniaturisés La beauté d’une telle miniature, que l’on date des environs de 1804-1808 réside dans la maîtrise technique et la mise en page de ses motifs à caractère botanique, qualités que ne cessaient de louer les critiques du vivant de Van Dael . Le petit format de l’oeuvre oblige l’artiste à recourir à une économie de moyens qui ne cèdent en rien à la souplesse de la facture associée à la subtilité des coloris. En effet, elles confèrent autant de fraîcheur que d’harmonie à notre gouache. Le bouquet de fleurs dans une corbeille d’osier posée.sur un entablement de marbre, est composé de cinq roses, auxquelles est adossé un bouquet d’oreilles d’ours d’où glisse une tulipe délicatement inclinée sur le marbre. Le contraste est particulièrement savoureux entre le végétal et le minéral, comme entre le ton chaleureux du rose avec celui plus froid du gris soutenu. Ces mêmes jeux d’opposition concourent au brio de la mise en page, puisque les lignes horizontales formées par la margelle et la corbeille s’équilibrent avec les courbes des fleurs, tiges et feuilles du bouquet. Van Dael apprécie cette formule et l’association des coloris puisqu’il les reprend sur le couvercle d’une bonbonnière conservée au Louvre . Enfin, les deux branches d’ancolies combinées aux deux tulipes flammées, situées au sommet du bouquet, épousent la forme arrondie du cadre. Tandis que sur ses oeuvres de grand format, Van Dael aime à introduire des gouttes d’eau pour traduire la fraîcheur du bouquet, ici, la vibration du geste – même précis – s’y substitue avec poésie. Van Dael et Joséphine : le témoignage d’une reconnaissance Si dans ses compositions Van Dael a su conserver le raffinement du savoir-faire et l’extrême élégance hérités de la tradition hollandaise et flamande du XVIIe siècle, dans le genre de la nature morte, il reste l’homme de son temps et s’inscrit dans le courant romantique naissant, lorsqu’il associe la représentation de fleurs à une réflexion mélancolique sur la vie et la mort. Le Tombeau de Julie acquis par l’impératrice Joséphine est à ce titre exemplaire, d’autant plus qu’il illustre parfaitement la passion pour la botanique de son propriétaire. Bien que Van Dael s’appuie sur des études détaillées de fleurs variées pour préparer ses oeuvres, il se distingue de son confrère Pierre-Joseph Redouté (1759-1840) plus enclin à traduire les recherches scientifiques contemporaines et agit au contraire, comme un poète se faisant l’interprète de la nature. La fascination qu’exerce notre miniature tient à la petitesse de son format qui ne laisse place qu’à l’intimité du regard du spectateur, qui suit le geste de l’artiste donnant vie aux fleurs qu’il décrit. Signée « VD », monogramme que Van Dael employait habituellement pour les oeuvres de petit format, notre gouache est sertie d’un cadre reliquaire en bronze doré, orné d’une frise de torsades et d’un chapelet en bordure extérieure. Le revers est protégé par un verre recouvrant une couronne impériale appliquée sur une soie verte. Appartenant aux héritiers de la famille de Tascher, l’oeuvre a donc été la possession de Joséphine avant 1809, date de sa répudiation. Alors que cinq peintures de Van Dael sont inscrites sur l’inventaire après décès, dressé en 1814 à Malmaison, la miniature n’est pas référencée. L’usage voulait que cette catégorie d’objets conservés dans des cabinets ou médaillers, ne fût recensée que dans le cas d’un accrochage au mur. Ainsi, notre gouache n’apparaît ni dans les inventaires, ni dans les catalogues de vente des héritiers de Joséphine, le prince Eugène et la reine Hortense. Par ailleurs, si Van Dael a pu récupérer certaines de ses commandes vers la fin de sa carrière, telle la toile acquise par Marie-Louise, notre miniature n’est pas présente dans la vente après décès du peintre, le 19 et 20 mai 1840 à Paris. Cependant, de nombreux éléments permettent de relier définitivement cette oeuvre à Joséphine, comme les armoiries impériales et la facture de l’oeuvre qui, de surcroît, concourent à situer sa réalisation vers 1804-1808, date de deux achats de peintures de fleurs de Van Dael payées 17.000 francs et 10.000 francs. De toute évidence, l’oeuvre est la marque de la gratitude de Van Dael au regard de l’intérêt et du soutien que l’impératrice lui accordait. En effet, il était de coutume d’offrir une oeuvre de format modeste à la suite d’une importante commande. De plus, la présence de l’urne souvenir en bélière du cadre rappelle la flamme du souvenir et indique surtout le témoignage d’une amitié. Van Dael, dont le prix des peintures était réputé élevé de son temps, s’est donc brillamment attaché à décrire l’objet de toutes les attentions de Joséphine, les fleurs, sur un objet intime de par sa nature ainsi que le sentiment romantique que l’artiste a su y insuffler. Ill. 1 : Louis Léopold Boilly, Étude préparatoire de Jean-François Van Dael pour la « Réunion d’artistes dans l’atelier d’Isabey », huile sur papier marouflé sur toile, H. 38 , L. 27,7 cm, Lille, Palais des Beaux-Arts, inv. P363. Ill. 2 : Jan Frans Van Dael, L’offrande à Flore, huile sur toile, H. 46,4 , L. 37,9 cm, Rueil-Malmaison, musée national des châteaux de Malmaison et de Bois-Préau, inv. MM.95.16.1 Ill. 3 : Jan Frans Van Dael, Le Tombeau de Julie, huile sur toile, H. 1,98 , L. 1,50 m, Rueil-Malmaison, musée national des châteaux de Malmaison et de Bois-Préau, inv. M.M.D.16