Loading Spinner
Don’t miss out on items like this!

Sign up to get notified when similar items are available.

Lot 70: JACQUES-ANDRE PORTAIL (BREST 1695-1759 VERSAILLES)

Est: €150,000 EUR - €180,000 EURSold:
Christie'sParis, FranceJune 23, 2010

Item Overview

Description

JACQUES-ANDRE PORTAIL (BREST 1695-1759 VERSAILLES)
Deux pages noirs
pierre noire et sanguine
27 x 23,5 cm.

Artist or Maker

Exhibited

Paris, Salle Martinet, Tableaux et dessins de l'école française, principalement du XVIIIème siècle, tirés de collections d'amateurs, 1860, no. 287.
Paris, Ecole des Beaux-Arts, Dessins de maîtres anciens, 1879, no. 501.
Paris, Galerie Georges Petit, L'art du XVIIIème siècle, 1883-84, no. 219.
Paris, Exposition Goncourt, organisée par la Gazette des Beaux-Arts pour le 75e anniversaire de la fondation de la Gazette des Beaux-Arts, 1933, no. 245, ill. p. 99.
Paris, Galerie L'oeil, Dessins français du XVIIIème siècle, 1969, no. 44, ill.

Literature

E. et J. de Goncourt, La du Barry, Paris, galerie Charpentier, 1878, p. 133 (édition remaniée de la 3ème partie des Maîtresses de Louis XV).
Recueil de 112 photographies tirées par la maison Braun d'après 113 dessins de la collection Goncourt, Paris, 1879, no. 80 (Paris, cabinet des estampes, inv. Aa. 80. a, in-f).
P. de Chennevières, 'Les dessins de maîtres anciens exposés à l'Ecole des Beaux-Arts en 1879', Gazette des Beaux-Arts, Paris, 1880, p. 96.
E. de Goncourt, La maison d'un artiste, Paris, Charpentier, 1881, I. pp. 33, 139.
P. de Chennevières, 'Portail', Gazette des Beaux-Arts, avril 1898, p. 330.
E. Launay, Les frères Goncourt collectionneurs de dessins, Paris, 1991, no. 257, ill.
X. Salmon, Jacques-André Portail 1695-1759, Cahier du Dessin français, no. 10, Paris, 1996, p.7, no. 51, ill.

Provenance

E. et J. de Goncourt (L.1089), acquis avant 1857 pour 68 francs (avec Le musicien du même artiste).
Vente E. de Goncourt, Paris, hôtel Drouot 16 février 1897, lot 239 (acquis par Mühlbacher pour 5500 francs).
Vente G. Mühlbacher, Paris, galerie Georges Petit, 15-18 mai 1899, lot 232 (acquis par A. G. Veil-Picard pour 7900 francs).
Arthur Georges Veil-Picard; saisi pendant la seconde guerre mondiale, puis restitué en 1946; par descendance au propriétaire actuel.

Notes

No VAT will be charged on the hammer price, but VAT payable at 19.6% (5.5% for books) will be added to the buyer’s premium which is invoiced on a VAT inclusive basis
D'origine nantaise, Jacques-André Portail est formé au métier d'architecte par son père dans sa région natale. Il s'installe tardivement à Paris, à partir des années 1740, lorsqu'il obtient le poste de garde des tableaux du roi, qui lui permet de bénéficier d'un logement à l'hôtel de la surintendance à Versailles. Il y réalise plusieurs vues du château, de l'orangerie et des jardins qui lui valent les honneurs de Sa Majesté. Parallèlement, il est chargé d'organiser chaque année le Salon.

Malgré une carrière artistique qui l'éloigne des honneurs et de la notoriété de l'Académie de Peinture, les feuilles de Portail attirent les amateurs de dessins éclairés, notamment ceux du siècle suivant, tels que Marius Paulme, Philippe de Chennevières, ou encore les frères Goncourt, qui possédèrent la feuille présentée ici. Ce dessin incarne en effet l'épitomé du XVIIIème siècle recherché par les Goncourt, celui d'un raffinement et d'une certaine grâce d'un art intime. En ces années, quand il y avait des 'dessins partout, des dessins mêlés à la ferraille, des dessins exposés entre des tire-bouchons sur des bouts de trottoirs', pour échapper à l'ennui des vacations qui duraient trop longtemps, les frères Goncourt allaient 'tour à tour conquérir à vil prix quelque précieux dessin: un dessin comme l'Epouse indiscrète de Baudouin, ou les Négrillons heiduques de Portail [...] Ah! L'heureuse époque pour un collectionneur, que ces années où, du lever au coucher du jour, il y avait chez les marchands d'estampes dix jours entiers à regarder des dessins français' (La maison d'un artiste, op. cit., pp. 32-4).

Ces deux 'petits nègres causant', comme les surnommaient les Goncourts, n'étaient pas sans leur rappeler le laquais qui était au service de la comtesse du Barry dans son château de Louveciennes : 'un de ces jolis petits monstres que ce siècle de chinoiseries aimait tant [...] baptisé par le prince de Conti, Zamore' (La du Barry, op. cit., 1878). L'iconographie du jeune Noir, qui peut surprendre dans la peinture du début du XVIIIème et sembler marginale, n'en est pas moins présente et plusieurs artistes majeurs, tels que Watteau, Carmontelle et Pigalle, s'y sont intéressés. Bien qu'oubliés de l'histoire 'officielle', les Noirs étaient présents dans de nombreuses maisons nobles parisiennes. A l'époque de la Révolution, le nombre de Noirs présents en France est estimé à quatre, voire cinq mille, dont plus des trois-quarts à Paris. Désormais, il était devenu prestigieux et à la mode, de pouvoir compter parmi ses serviteurs des laquais noirs. Ceux-ci sont d'ailleurs souvent représentés dans les 'fêtes galantes' aux côtés de leurs maîtres, en retrait ou les servant. Habillés de somptueux habits, emblèmes du goût et de l'aisance de leur maître, ils sont fréquemment dépeints portant des turbans emplumés, qui renvoient à la mode exotique du moment et semblent les déguiser en petits eunuques d'une pseudo-cour ottomane (voir Etre noir en France au XVIII siècle, 1685-1805, cat. expo., Musée du Nouveau Monde, La Rochelle 2010, pp. 10-13). Plus rarement, comme c'est le cas de notre dessin, ces Noirs deviennent le sujet principal et unique d'une toile ou d'un dessin. Citons seulement deux autres exemples: tel le Jeune nègre peint par Hyacinthe Rigaud (Dunkerque, musée des beaux-arts) ou Narcisse nègre du duc d'Orléans par Louis de Carmontelle (Chantilly, Musée Condé; op. cit. pp.17-20, 40). Si au XVIIème siècle les études de têtes d'hommes Noirs sont souvent préparatoires au personnage de Balthazar pour L'Adorations des Mages, au XVIIIème, ils deviennent désormais de vrais portraits.

C'est certes à Chennevières que nous devons la redécouverte au XIXème siècle des dessins de Portail. Toutefois, le Portail le plus recherché devient celui plus 'Watteauesque', le dessinateur des portraits de femmes, des couples, des musiciens, toujours tracés à la pierre noire et la sanguine (Salmon, 1996, op. cit. p. 6). Le marquis de Chennevières écrivait de Portail qu'il 'emploie d'une manière originale les crayons de Watteau et il en a presque l'esprit et le déluré, bien plus original et plus vraiment lui-même que Lancret et que Pater. Il traduit non pas les êtres de son imagination, comme Watteau qui est un indépendant, mais les personnages de cour qu'il a sous les yeux [...] mieux que nul autre peut-être, les vraies allures un peu composées et les sentiments passablement frivoles et pervertis' ('Les dessins de maîtres anciens', 1880, op. cit.). Mais bien que les sujets dessinés par Watteau et Portail soient proches, leurs techniques diffèrent. Alors que Portail représente les deux jeunes Noirs, accoudés à une table, par un fin et délicat réseau de hachures à la sanguine et pierre noire, en insistant sur les détails des costumes et des turbans, Watteau préfère souvent un plus grand dépouillement, accentué par un cadrage resserré autour des visages, et un jeu d'ombres et lumières réalisé avec une pierre noire très grasse. Exemples parfaits de cette technique sont ses célèbres Trois études de la tête et du buste d'un jeune Noir (fig. 1, Paris, musée du Louvre, inv. no. R.F. 28721) et Huit têtes (Louvre, inv. 33383), dans lesquels Watteau dessine trois fois la même tête de jeune homme qu'il utilisera pour deux autres compositions picturales.

L'emploi de cette iconographie du Noir n'est pas non plus un cas isolé dans l'oeuvre de Portail. Ainsi le même page avec une coiffure identique se retrouve dans un autre dessin, également traité à la sanguine et pierre noire, représentant La dame et le jeune Nègre (Vienne, Staatliche Graphische Samlung Albertina, inv. no. 12099).

Habile coloriste, toujours soucieux de la précision et du détail, Jacques-André Portail est l'un de ces artistes dont la technique si particulière est immédiatement reconnaissable. Ce dessin n'échappe pas à la règle, bien que possédant un attrait supplémentaire lié à l'originalité de son thème et à la qualité exceptionnelle du détail dans les vêtements, les perles et les plumes. Le temps semble comme suspendu sur cette feuille, et les deux petits pages prêts à répondre à l'appel de leur maître d'une minute à l'autre.

For an English version of this lot note, please visit www.christies.com
Jacques-André Portail (Brest 1695-1759 Versailles)
Two young black pages
black and red chalk
27 x 23,5 cm.

For Provenance, Literature and Exhibitions please see above

Born in Nantes, Brittany, Jacques-André Portail was trained as an architect by his father in his native region, before moving to Paris in the 1740s. He was there appointed as Surveyor of the King's pictures, in which capacity he benefited from lodgings at the residence of the Surintendance in Versailles. He executed several views of the castle and the orangery, as well as the gardens of Versailles, which brought him recognition from the the king, and was responsible for organising the annual Salon.
In spite of an artistic career that strayed from the fame and honors of the Academy of Painting, Portail's sheets were admired and sought-after both by his enlightened contemporaries and by collectors in the 19th century, such as Marius Paulme, Philippe de Chenneviéres and the Goncourt brothers, the latter having owned several drawings including the present sheet. This drawing embodies the epitome of the XVIIIth century which the Goncourts envisaged, that of a refined style and of a certain grace of an intimate art. In those years when there were 'drawings everywhere, drawings next to scrap iron, drawings shown in between corkscrews on sidewalks', in order to avoid the bore of lengthy auctions which lasted far too long, the Goncourt brothers went around 'and bought for a base price some precious drawings : drawings such as the Indiscreet wife by Baudouin, or the Négrillons heiduques par Portail [...] Ah! Such happy times for a collector, those years, when from dawn to dusk one could spend ten days in a print dealer shop looking through French drawings portfolios' (La maison d'un artiste, op. cit., pp. 32-4).

Portail's two 'little negroes chatting' as the Goncourt brothers would call them, are reminiscent of the lackey who was in service at the countess du Barry's castle of Louveciennes: 'one of these lovely little monsters that this century of exotic knick knack liked so much [...] named by the prince of Conti, Zamore. (La du Barry, op.cit.). In early 18th-century art, the figure of the youthful black servant played a small and yet significant role; several major artists, such as Watteau, Carmontelle and Pigalle, became interested in their representation and contributed to the developement of their iconography. Although largely overlooked by traditional history, young black men and women were engaged as servants in a number of Parisian noble houses. At the time of the Revolution, it was estimated that there were between four and five thousand black people in France, of whom more than three quarters lived in Paris. Since the begining of the 18th century, it had been very fashionable and a sign of prestige to have a black servant, and these servants were often represented accompanying their masters in 'fêtes galantes'. Dressed in sumptuous clothing, to emphasise the refined taste of their masters, these black servants often wore feathered turbans and costumes which suggested the exotic opulence of a pseudo-Ottoman court (see Etre noir en France au 18eme siècle, 1685-1805, cat. expo., Musée du Nouveau Monde, La Rochelle 2010, pp. 10-13). Despite their increasing representation in genre and group scenes of this period, it was nevertheless rare for a black man or woman to be the main focus of a work of art. Two other examples where this is a case are the Jeune nègre by Hyacinthe Rigaud (Dunkerque, Musée des Beaux-Arts) and Narcisse nègre du duc d'Orléans by Louis de Carmontelle (Chantilly, Musée du Condé; Etre noir en France, op.cit., pp.17-20, 40). While in the 17th century, studies of the heads of young black men had usually been preparatory for the figure of Balthazar in the Adoration of the Magi, or secondary figures in larger scenes, the 18th century saw such studies being executed as portraits in their own right, of real and identifiable people.

It was the famous collector Philippe de Chennevières who, in the 19th century, rediscovered Portail as a draftsman. However, in contrast to the Enlightenment taste, which admired Portail's more finished compositions, 19th-century critics preferred those works in which he came closest to the style of Jean-Antoine Watteau; that is, works of elegant young women, couples or musicians, always drawn with black and red chalk (Salmon, 1996, op.cit., p.6). The marquess de Chennevières wrote of Portail that he used 'Watteau's chalks in an original way, with a special touch that is almost lighter and livelier than in a Lancret or Pater. He did not invent from his imagination as Watteau did, rather Portail's figures are directly derived from the people of the court that surrounded him [...] and better than anyone else he translated their attitudes and frivolous feelings' ('Les dessins de maîtres anciens', 1880, op. cit.). Although the works of Watteau and Portail are close in their choice of subject-matter, their techniques differ. Portail's drawing, which shows two young black boys, leaning on their elbows on a table, is characterised by a subtle and delicate interplay of hatching with red and black chalk. Watteau however preferred a draughtsmanship of greater sobriety, focusing on the faces and accentuating the play of light and shadow rendered with an oily black chalk. Perfect example of Watteau's way of proceeding are his famous Three studies of the head and bust of a young black man (fig.1, Paris, Louvre Museum, R.F. 28721), and Huit Têtes, also in the Louvre (inv. 33383).
The present drawing is not unique in Portail's work in its representation of a black figure. The same black servant with an identical hairstyle is found in another drawing, also treated with black and red chalk, representing La dame et le jeune Nègre (Vienna, Staatliche Graphische Samlung Albertina, inv.no.12099).

A skilful colourist, and always concerned with precision and detail, Jacques-André Portail is one of the artists whose technique is so particular that it is immediately recognizable. This drawing is no exception to the rule, yet it is enlivened by the originality of the theme and the exceptional quality of the details of the clothing, pearls and feathers. Time in this sheet seems suspended and the two page-boys seem ready to be called at any moment by their employer.


Auction Details