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Ces deux dessins sont à mettre en relation avec le célèbre ouvrage Tableaux historiques de la Révolution française publié pour la première fois dans sa forme complète en 1817, et devenu rapidement la plus ambitieuse entreprise éditoriale de l'époque révolutionnaire. Témoignage exceptionnel, l'ensemble iconographique des Tableaux est l'outil visuel le plus complet de cette période et offrit une histoire en images de la Révolution française. Commencé en juillet 1791, et constitué au départ de seulement 48 gravures accompagnées de textes, il fut réédité cinq fois entre 1791 et 1817.
Les deux dessins présentés ici sont liés aux sujets de deux des gravures des Tableaux Historiques, numéros 22 et 27, mais en présentent plusieurs variantes par rapport aux versions gravées.
Le premier, La Bénédiction des drapeaux, illustre les bataillons fayettistes qui à l'aube du 27 septembre 1789 s'étaient rendus à Notre-Dame en ordre de marche et au son du tambour, pour en faire bénir les drapeaux. Dans l'église, on y observe les fameux 'Mays', de grands tableaux religieux traditionnellement offerts par la corporation des orfèvres, qui ornent la partie supérieure de la nef. L'épisode illustre la domination de la coalition fayettiste sur la vie politique. Cette milice, créée par la municipalité le 13 juillet 1789, incarnait l'une des aspirations révolutionnaires : l'armement des citoyens. Quelques semaines après la prise de la Bastille, l'Assemblée décida de solenniser la bénédiction des drapeaux, dans l'église de Notre-Dame.
Dans la première édition des Tableaux (fig. 1) la gravure qui illustre cet épisode fut exécutée d'après un dessin de Jean-Louis Prieur, aujourd'hui conservé au musée Carnavalet à Paris (voir Prieur, les Tableaux historiques de la Révolution. Catalogue raisonné des dessins originaux, cat. expo. Musée Carnavalet, Paris 2006, no. 26); La Fayette se trouve au centre, la main tendue en un geste dominateur, alors qu'on distingue à peine l'archevêque bénissant les étendards. Dans le dessin de Hoüel en revanche, l'archevêque est au centre, et s'adresse à la Fayette qu'on reconnaît sur la gauche aux cotés de Jean-Sylvain Bailly, un de ses proches et devenu maire de Paris au lendemain du 14 juillet. Par rapport à la composition très ordonnée et précise de Prieur, le dessin de Hoüel apparaît beaucoup plus mouvementé, comme si l'artiste avait expressément voulu transmettre dans sa composition l'énergie et la frénésie de ces journées fébriles.
Dans le deuxième dessin, Hoüel réinterprète un autre épisode déjà illustré par Prieur (Prieur, op. cit., no. 21). Il accentue une fois de plus la présence de La Fayette par le biais de son épouse : la marquise de La Fayette, au premier plan, fait la quête auprès de militaires en uniforme. Les deux dessins illustrent les services funèbres des citoyens morts au siège de la Bastille. Dans la feuille de Prieur c'est le service qui eut lieu dans l'église Saint-Jacques-l'Hopital; dans celui de Hoüel il s'agit de l'église du Saint-Sépulcre, dans le quartier Saint-Denis, détruite vers 1792. Les familles des victimes vainqueurs du 14 juillet y sont représentées complètement submergées par l'émotion.
Si le dessin de Prieur décrit méticuleusement l'intérieur de l'église, la feuille de Hoüel met plutôt l'accent sur la présence au premier plan de la marquise de La Fayette et sur l'animation de la scène. Le prêtre sur son pupitre prêche bras ouverts, au premier plan, les assistants amènent des chaises dont la location sera reversée aux veuves des citoyens morts. Aux murs, des tentures noires ont été installées pour cette funèbre occasion.
Malgré une vieille étiquette collée au dos des cadres attribuant les deux dessins à Jean Duplessi-Bertaux, l'auteur de ces feuilles doit être reconnu dans l'artiste Hoüel. En effet, le 4 juillet 1792 l'architecte Vaudoyer, qui était en charge du château de Chavaniac, une des proprietés de La Fayette, informait le général que les Tableaux historiques qu'il avait commandé étaient arrivés au château : " J'ai reçu les neuf Tableaux des évènements de la Révolution que vous avez ordonnés à Mr Hoüel avant votre départ. Ils sont : L'évènement du Prince Lambesc, Prise d'armes au Garde-Meuble, Prise d'armes aux Invalides, Prise de la Bastille, Intérieur de la Bastille, Quête de Mme de la Fayette au Sépulcre, Bénédiction des drapeaux à Notre-Dame, arrivée du Roi à Paris le 17 juillet, Arrivée du Roi à Paris le 6 octobre (Chavaray, op. cit.). Parmi ceux-ci, nous reconnaissons nos deux dessins ; les autres, comme par exemple la Prise de la Bastille (fig. 2), sont pour la plupart conservés à la Bibliothèque Nationale de Paris (voir La Révolution française. Le premier Empire, op. cit.).
Avec son ami Moreau le Jeune, Hoüel fut impliqué dans les évènements révolutionnaires ; il participa à la Loge des Neuf Soeurs où, autour des auteurs des Révolutions américaine et française, les artistes voués à la propagande se réunissaient. Ce n'est donc pas un hasard si La Fayette lui commanda cette série censée reproduire certains des épisodes déjà illustrés par Prieur. En réinterprétant les deux sujets à sa manière, et contrairement aux gravures déjà publiées, Hoüel met ici l'accent sur le rôle et la présence de la Fayette, plus fortement que dans les gravures publiées. Le général songeait-il faire publier une autre édition des Tableaux Historiques, ou s'agissait-il plutôt d'un souvenir personnel de ces glorieux et difficiles moments vécus ?
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JEAN-PIERRE-LOUIS-LAURENT HOUEL (ROUEN 1735-1813 PARIS)
Blessing of the flags in Notre-Dame ; and Mrs La Fayette in the church of Saint Sepulchre collecting alms for the citizens' widows
black chalk, pen and brown ink, watercolour with white heightening
38,4 x 50,7 cm.
For Provenance, Bibliography and Exhibitions see above.
These two drawings are related to the famous work Tableaux historiques de la Révolution française, published for the first time in its complete form in 1817, which rapidly became the most ambitious editorial project of the revolutionary period. An exceptional account, the whole iconography of the Tableaux is the most complete visual expression of the period. Spread over twenty five years, it includes 221 engraved plates. The work was distributed by subscription with two monthly deliveries, and offered a story in pictures of the French Revolution. Started in July 1791 and composed in the beginning of only 48 engravings accompanied by texts, it was republished five times between 1791 and 1817. Given the political implications of this publication and the troubled period that accompanied it, each edition was different and underwent changes in terms of text and images.
The present two drawings are linked to the subjects of two of the prints of the Tableaux Historiques, numbers 22 and 27, but vary in several respects from them. The first, La Bénédiction des drapeaux illustrates the battalions of La Fayette who at dawn on the 27th September 1789 had gone to Notre Dame, in a march and to the sounds of the drums, to bless the flags. In the church, one can observe the famous Mays large religious paintings traditionally given to the church by the corporation of goldsmiths, which decorate the upper level of the nave. This episode illustrates the domination of La Fayette's coalition in the political life of that period, and embodied the aspirations of the French revolution: the arming of citizens. A few weeks after the taking of the Bastille, the Assembly decided to honor the blessing of the flags in the church of Notre Dame.
In the first edition of the Tableaux, the print (fig.1) that illustrates this episode was executed after a drawing by Jean-Louis Prieur (Prieur, les Tableaux historiques de la Révolution. Catalogue raisonné des dessins originaux, cat. expo. Muse Carnavalet, Paris 2006, no. 26); La Fayette is at the center, his hand extended in a domineering gesture, while one can barely distinguish the archbishop blessing the flags. In Hoüel's drawing, on the contrary, the archbishop is in the centre and addresses La Fayette, who can be recognized on the left. Compared to Prieur's carefully-composed and detailed composition, Hoüel's drawing appears much more disorderly, as if the artist had expressly wished to convey in his composition the energy and frenzy of those uncertain days.
In the second drawing, Hoüel reinterpreted another episode already illustrated by Prieur. He emphasizes once again the presence of La Fayette through his wife: the marquise de La Fayette, seen in the foreground, collecting the alms beside servicemen in uniform. The two drawings illustrate the funeral services of the citizens killed in the siege of the Bastille. In Prieur's drawing, the service takes place in the church of Saint-Jacques-l'Hôpital, but in Hoüel's the scene is set in the church of the Saint-Sepulcre, in the rue Saint-Denis, which was destroyed around 1792. The families of the victims, victors of the 14 July, are represented entirely overwhelmed by emotion. While Prieur's drawing describes meticulously the church's interior, Hoüel's instead emphasizes the presence in the foreground of the marquise de La Fayette and the animosity of the scene. The priest preaches tumultuously from his pulpit, with arms flung open, while in the foreground people gather chairs to hire out, whose profits would be given to the widows of dead citizens. On the walls, black draperies have been set up for the funeral ceremony.
Despite an old label on the back of the frames attributing the two drawings to Jean Duplessi- Bertaux, the author of these sheets must be recognized as Hoüel. In fact, on 4 July 1792 the architect Vaudoyer, who was in charge of the castle of Chavaniac, one of La Fayette's properties, informed La Fayette that the Tableaux historiques ordered by the marquis had arrived at the castle: "I have received the nine Tableaux des événements de la Révolution that you had ordered before your departure from M. Hoüel. They are: L'évènement du Prince Lambesc, Prise d'armes au Garde-Meuble, Prise d'armes aux Invalides, Prise de la Bastille, Intérieur de la Bastille, Quête de Mme de la Fayette au Sépulcre, Bénédiction des drapeaux à Notre-Dame, arrivée du Roi à Paris le 17 juillet, Arrivée du Roi à Paris le 6 octobre (Chavaray, op. cit.). Among these, we recognize the present two drawings; the others, for example La Prise de la Bastille (fig.2), are for the most part kept at the Bibliothéque Nationale de Paris (see La Révolution française. Le Premier Empire, op.cit.). The style, like the dimensions, of the present drawings and of Prise de la Bastille are the same, whereas they are are different from those of Duplessi-Bertaux, as we can observe in other sheets he drew for the Tableaux Historiques, which are now kept in the British Museum, London (see C. Hould, 'Les dessins originaux de Duplessi-Bertaux pour les vignettes des portraits des Tableaux historiques de la Révolution Française', in Symbols, Myths and Images of the French Revolution, Essays in Honour of James A. Leith, University of Regina, Canada, 1998, pp.73-89).
With his friend Moreau le Jeune, Hoüel was involved in the revolutionary events. He was a regular at the "Loge des Neuf Soeurs" where, surrounded by the authors of the American and French revolutions, the artists devoted to the propaganda met.
It is therefore no accident that La Fayette commissioned him to execute this series, which is supposed to reproduce some of the episodes that were already illustrated by Prieur. By reinterpreting the two subjects from his own point of view, in a different manner from the etchings which had already been published, Hoüel emphasizes the role and the presence of La Fayette, more than was the case in the previous prints. Was La Fayette thinking of publishing another edition of the Tableaux Historiques or was it rather a personal souvenir of the glorious and difficult time he had lived?